Gangnam Style : critique imprévue d’une sensation folle

27 Novembre 2012


Désormais, il est rare de ne pas entendre la célèbre chanson « Gangnam Style », interprété par le chanteur et rappeur sud-coréen Psy, ou Park Jaesang, jusqu’à présent connu que dans son pays où il a déjà sorti six albums. Sensation k-pop, « Gangnam Style » a réussi à s'imposer grâce à son clip, illustrant Park, un homme de 34 ans, se mettant au trot et dansant parmi de jeunes filles.


Déjà visionnée plus de 792 millions de fois depuis sa mise en ligne le 15 juillet dernier, c’est la vidéo la plus vue de l’histoire de Youtube. Cependant, malgré un succès fou, rare sont ceux connaissant la véritable signification des paroles.

Gangnam est un quartier de Séoul, très calme pendant la journée et complètement fou le soir. C’est un coin chic et huppé de la capitale Sud-Coréenne, réputée pour ses boutiques de luxe, ses bars et ses boites de nuit branchées. La chanson célèbre une sorte de "Mecque" de l’hédonisme et de l’amusement basé sur la consommation matérialiste,  faisant référence à une culture coréenne dont les valeurs restent la poursuite d’une meilleure classe sociale et l’opulence qui s'y accomode.
Les paroles dénoncent également les relations sexuelles entre les jeunes filles et les hommes âgés de ce quartier. L’expression « oppa », présente dans le refrain, peut être traduite par « grand frère » ou « chéri » selon le contexte. Là, c’est un terme affectif utilisé par les coréennes pour parler des hommes plus murs.
Ici, Park joue lui-même le rôle d’un de ces « oppa », un homme d’âge mûr et peu attirant.

Comment a-t-il fait sensation au point de réunir 20 000 personnes pour un « flash mob » au pied de la tour Eiffel?

Les vedettes américaines, telles que le rappeur T-Pain et la chanteuse Katy Perry, ont exprimé leur admiration pour le « Gangnam Style ». En surface, le clip montre la combinaison ridicule d’un homme clownesque au monde du luxe. Des mouvements étranges et un rythme entraînant en font une danse facile à apprendre. Pourtant, malgré un air bouffon, Park pourrait être plus sage qu’on ne le dit.

Park a fait sa formation aux États-Unis, à l’Université de Boston et au Collège de Berklee, où il décroche son diplôme universitaire. C’est grâce à un contact dans le monde musical américain qu’il arrive à jouer avec le courant dominant. Comme un satiriste intelligent, il fait ce que les médias corporatifs coréens lui demande (il se présente dans les émissions de télévision populaires pour gagner en popularité) de telle façon qu’il peut profiter d’une plateforme de critique sociale.
Ce qui n’est pas immédiatement évident aux auditeurs, c'est sa critique subversive d’une société coréenne (et, par extansion, internationale) qui devient de plus en plus hyper-capitaliste et matérialiste.
Dans son clip, Park rassemble tous les symboles de l’opulence de Gangnam pour montrer finalement quelque chose de plus modeste. Les exemples sont nombreux : il se trouve sur une plage luxieuse qui s'avère être une aire de jeu sablée; il visite un sauna en compagnie de truands au lieu d'hommes d’affaires; il danse parmi des touristes sur un bus et pas dans une boite de nuit...

Le clip est donc avant tout une satire du "Gangnam-style" et de tous ceux qui le cherche sans savoir ce que c'est réellement.
Alors que nous le regardons comme une nouvelle chanson de l'industrie du tube, "Gangnam style" serait plutôt une lamentation de notre société creuse et sans substance érigeant la richesse et l'opulence comme style de vie le plus abouti.
Et cette fois-ci, c’est à travers le ridicule que l'on découvre la vraie absurdité de nos sociétés modernes...



Rédactrice au sein du Journal International depuis 2012, je suis une étudiante canadienne en… En savoir plus sur cet auteur